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Une
contribution française
par
Jean-Edouard Goby, ingénieur des Ponts et Chaussées à
la Compagnie universelle du canal maritime de Suez, rédacteur en
chef de la Revue Historique et géographique de l’Isthme de
Suez, membre de l’Institut d’Égypte.
Lorsque le travail normal reprend sur le canal de Suez après
les événements de la Seconde Guerre mondiale, le climat
a considérablement évolué : la Compagnie universelle
de canal maritime de Suez voit se rapprocher la date prévue pour
la fin de la concession octroyée par l’Égypte : quatre
vingt dix neuf ans à partir de l’inauguration, c’est-à-dire
pour 1968. Par ailleurs, la reconnaissance péniblement acquise
de son indépendance par l’Égypte - ou pour parler
plus vrai arrachée, le départ des troupes britanniques et
le principe acquis de l’égyptianisation progressive des effectifs
et des cadres de la Compagnie universelle, provoquent un changement des
comportements : une revue bilingue, français-arabe : Le Canal -
est publiée régulièrement, et une revue de plus haut
niveau intellectuel est créée : le Bulletin historique et
géographique de l’Isthme de Suez.
Plutôt qu’à un littéraire, ce dernier est confié
à un ingénieurs des Ponts et Chaussées, Jean-Edouard
Goby qui semble passer l’essentiel de son temps à cette tache
jusqu’en 1956 ; correspondant d’importantes sociétés
scientifiques et savantes françaises, il publiera par exemple une
grosse étude sur le Premier Institut d’Égypte, restitution
des comptes rendus des séance, à l’Institut de France,
académie des Inscriptions et Belles lettres. Il figure parmi les
membres de l’Institut d’Égypte à côté
du prince Omar Toussoun, de Taha Hussein, de Philippe Lauer et du père
Georges Anawatty. Son impressionnante bibliographie tourne autour de l’expédition
de Bonaparte et de l’Institut d’Égypte d’une
part, de l’Isthme de Suez d’autre part. Sa riche bibliothèque
de travail a été transférée en France en 1956
; elle a été partagée en deux, une partie rejoignant
à Roubaix nos collections des Amis du Canal de Suez, l’autre
demeurant en caisse à l’Institut de France ; récemment,
le chancelier Gabriel de Broglie nous a demandé de les prendre
en charge afin de valoriser un trésor documentaire entreposé
sommairement jusque là à l’abbaye de Chaalis près
de Paris. Mmes Lina Sbei et Faten Naïm Rouchdy viennent de le classer
dans nos locaux de la rue d’Astorg où nous étions
jusqu’à ces derniers temps hébergés par GDF
SUEZ.
Le déménagement récent de ce vénérable
immeuble historique, ancien siège de la Compagnie universelle du
canal maritime de Suez, a rendu urgent une décision quant au sort
des collections. Au mois de décembre 2011, j’avais assisté,
consterné, à l’incendie de l’Institut d’Égypte,
et à l’arrivée de camions de livres fumants et trempés
par l’eau des pompiers : j’étais invité au Caire
par le Dr Saber Arab, alors directeur du Livre et des Archives à
Dar el-Koutoub, Cornich al-Nil, à contribuer au colloque qu’il
avait organisé sur « Archives et Révolution ».
L’éventualité du transfert des collections de Jean-Edouard
Goby avait déjà été évoquée
; la presse s’était empressé de s’en faire l’écho.
La situation en Égypte à ce moment là, vue d’Europe,
avait fait reporter cette question. Maintenant, les temps ont évolué,
et la volonté de l’Égypte de développer la
recherche historique et la valorisation de son patrimoine récent,
sans pour autant abandonner la période pharaonique, s’est
confirmée et amplifiée ; je réitère notre
proposition de dépôt de la bibliothèque de Jean-Edouard
Goby à l’Institut d’Égypte s’il veut bien
l’accepter.
La pose solennelle hier de la première pierre d’un musée
du canal à Ismaïlia en présence des ministres des Antiquités
et de la Culture, à l’invitation de l’amiral Mohab
Mamish, aurait comblé les vœux de cet amoureux du canal de
Suez, de l’Égypte, de la France et de leur patrimoine commun.
Je suis enfin chargé par l’Académie des Sciences sociales,
lettres et arts de Versailles et d’Île de France, dont j’ai
assuré récemment la présidence, de vous proposer
une partie de ses collections de revues des Sociétés savantes
françaises, exacte réplique de ce qui a brûlé
ici en 2011.
Depuis plusieurs années enfin nous contribuons à la numérisation
avec reconnaissance optique des caractères, de la presse francophone,
grecque et italienne du canal de Suez, grâce au Centre d’Études
alexandrines de Jean-Yves Empereur ; cela fait partie également
de notre contribution à l’histoire de l’Égypte.
L’Institut d’Égypte est un lieu privilégié
de rencontre fraternelle des cultures égyptienne et française.
Arnaud Ramière de
Fortanier, président de l’Association-fondation du
Souvenir de Ferdinand de Lesseps et du canal de Suez.
Le Caire, Institut d’Égypte le 18 novembre 2013.
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